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BASSEM KAMAR

GEFIC

Peut-on influer sur l’avenir du monde ? En avoir une vision claire ? Quelles stratégies économiques mettre en place à long terme pour le bien-être du plus grand nombre ? Comment guider les investisseurs qui souhaitent s’implanter dans les pays du Moyen-Orient, du Golfe, en Afrique ? Bassem Kamar a créé GEFIC, un cabinet international de conseil en stratégies économiques de l’avenir et réunit celles et ceux qui souhaitent appor-ter leur expertise à l’édifice. Rencontre avec un économiste érudit, visionnaire, humaniste, résolument en action.

Bassem Kamar, photo Dominique Agius

GEFIC – Global Economics & Finance Consulting
Bassem Kamar est un homme influent et… chaleureux. La profondeur de ses réflexions n’altère en rien sa simplicité et son enthousiasme. Il vient de quitter son poste de chef économiste à la
CBUA – Banque centrale des Émirats arabes unis – après une carrière de consultant en économie financière au sein d’autres institutions internationales, le FMI – Fonds monétaire international – et la BERD – Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Il se consacre aujourd’hui à son cabinet de conseil en stratégie GEFIC. Je me définis comme un stratège en économie de l’avenir, je conseille les gouvernements, les décideurs et les entreprises dans la mise en œuvre de stratégies économiques à long terme. En particulier les pays du Moyen-Orient avec lesquels j’ai travaillé durant de nombreuses années. Reconnu pour son expertise en stratégie économique et monétaire, il possède une connaissance pointue de ces pays-là, de leurs cultures, de leurs tissus économiques et un réseau de contacts à tous les niveaux : entrepreneurial, institutionnel et politique. Bassem collabore avec un socle d’experts qu’il connaît depuis longtemps, avec lesquels il partage des valeurs fortes. Nous devons participer activement à imaginer le monde de demain. Il faut avoir des visions à long terme, de cinquante ans et plus, il faut inventer d’autres modèles économiques. Cela fait plus de vingt ans que j’effectue des recherches sur la diversification économique des pays du Moyen-Orient. Quand un pays réfléchit à ce qu’il va offrir au monde, l’après pétrole par exemple, on doit être en mesure de l’accompagner, se placer à un haut niveau stratégique, s’entourer d’experts ; mais déceler également la personne hors norme, capable d’apporter une innovation pouvant changer le monde. Quand je discute avec un ministre, je comprends exactement ce qu’il envisage. L’équipe de GEFIC accompagne chaque projet, de l’élaboration à la mise en pratique, apporte son expertise sur les moyens techniques et humains à mettre en place, encadre et transmet son savoir, met à disposition son réseau tout au long du processus.

Comprendre

Il est peut-être là le socle de l’insatiable curiosité de Bassem et le dénominateur commun à tous ses projets. Ses premiers questionnements débutent alors qu’il est enfant. Le mélange des cultures auquel j’ai été exposé très jeune a certainement forgé ce que je suis devenu. Il a deux ans lorsque son père, ingénieur naval sur les plates-formes pétrolières à Port-Saïd, est muté en Principauté de Monaco. Bassem grandit dans un univers protégé, un cocon ouaté. Pourtant, à l’âge de 9 ans, il éprouve son premier choc culturel. Ses parents décident d’envoyer Bassem et ses sœurs au lycée français du Caire pour ne pas les priver de la culture de leur pays d’origine et leur permettre d’apprendre l’arabe. Bassem déménage avec sa mère et ses sœurs au Caire et découvre, dans certains quartiers, la pauvreté et la misère qui l’interpellent. Je me suis demandé pourquoi il y avait un tel contraste entre ces deux mondes ? Pourquoi la pauvreté ? Je ne sais pas à quel point cela a affecté mes ambitions professionnelles mais l’envie d’agir s’est ancrée en moi. Il passe son enfance entre l’Égypte et Monaco. Mais c’est en Égypte qu’il obtient son premier diplô-me, une maîtrise de management, crée une entreprise d’import-export à l’âge de 20 ans et fait ses premières armes d’entrepreneur. J’étais jeune, pas toujours pris au sérieux. J’ai appris… Je suis un homme de parole, une parole vaut mille signatures. À l’époque, le taux de douane sur l’importation des voitures neuves en Égypte est de 200%. Par conséquent, le marché de l’occasion devient inaccessible pour un grand nombre d’habitants. Bassem a une idée : je faisais démonter des voitures en France, que j’achetais dans les casses et que j’exportais en pièces détachées au Caire dans des containers. Tout est réparable, j’étais entouré de personnes incroyablement douées, ça démystifie l’automobile. Je n’ai jamais arrêté d’acheter et de vendre des voitures. Bassem est d’ailleurs aujourd’hui un collectionneur avisé de voitures. Un événement va mettre fin à cette activité et l’inciter à reprendre des études : la révision des accords du GATT qui aboutit, entre autres, à une réduction des droits de douane entre l’Égypte et l’Union européenne. Bassem veut comprendre cet impact sur son entreprise et décide d’entamer des études en économie. Son parcours professionnel va prendre un tout autre chemin…

Rencontres

Le jeune chef d’entreprise n’a pas de temps à perdre. À l’université du Caire, le cursus qu’on lui propose est bien trop long pour lui qui a déjà une maîtrise et une entreprise à développer. Un homme va changer le cours des choses. Claude Berthomieu, professeur à l’université de Nice Sophia-Antipolis – aujourd’hui université Côte d’Azur – accepte de le recevoir et l’écoute avec attention. Devant sa motivation, il l’intègre directement en DEA. Le professeur Claude Berthomieu m’a donné ma chance, il a misé sur moi, sur ma persé-vérance. J’ai travaillé dur et j’ai eu ce diplôme. Le niveau de son mémoire de soutenance est salué à l’unanimité. Le jury l’engage à poursuivre une thèse de doctorat. Pour son sujet de thèse, lui revient à l’esprit la rencontre avec le professeur tunisien Chedli Ayari, qui lui avait enseigné le taux de change et l’influence désastreuse de ses fluctuations lors de la crise asiatique de 1998. Je pressens qu’une telle crise peut arriver en Égypte et je décide de faire une thèse de doctorat sur le taux de change. Sa fascination pour la monnaie ne date pas d’hier. Mon père qui voyageait dans le monde entier avait des devises de différents pays, j’ai toujours été intrigué par les billets de banque, les devises, les taux de change. Comment calcule-t-on un taux de change, quelle devrait être la valeur d’équilibre de la monnaie ? En fonction de ces critères, quelles sont les politiques économiques à mettre en place ? Bassem se découvre une passion pour la recherche qu’il entrevoit comme le moyen d’agir en profondeur sur la réalité économique des pays : il ne suffit pas de trouver une solution, il faut chercher à la mettre en pratique. Je pense que les impli-cations politiques, la coopération sont primordiales pour l’humanité. Bassem enchaîne les conférences à l’international, les prix comme le prix Ibn Khaldun décerné par la Middle East Economic Association et décide d’approfondir ses connaissances en apprenant l’économétrie, les mathématiques appliquées à l’économie. Il rencontre des experts reconnus dans le domaine comme Katarina Juselius et Søren Johansen qui reconnaissent la qualité de son travail de chercheur. Adoubé par ses maîtres : je me suis senti légitime en tant que chercheur. Une nouvelle rencontre a son importance. Il est encore thésard et aimerait enseigner. L’IUM – International University of Monaco –, cherche un professeur d’économie expérimenté. Un quiproquo provoque la rencontre. La doyenne qui l’accueille le confond avec un autre prétendant et le présente au président d’alors Maxime Crener. Ce dernier lui confie un cours… puis un emploi à plein-temps comme professeur d’économie, puis la direction de la recherche scientifique de l’université.

Bassem Kamar avec Ibrahim Elbadawi, Economic Research Forum, Sharjah, octobre 2002

Transmettre

Transmettre est une passion… Et le fondement de toutes ses activités. Il cumule le métier de professeur à l’IUM, les publications de ses recherches et les colloques à travers le monde, lorsqu’il est repéré par Ibrahim Elbadawi – à l’époque expert de la Banque mondiale – lors d’une conférence sur le taux de change au Liban ; qui l’invite à Washington DC afin de participer à un travail collaboratif de recherche destiné à une publication internationale. Il profite de ce séjour pour se rendre au FMI ; son contact lui suggère de postuler à un poste de chercheur-enseignant. La probabilité d’y accéder est très faible, en moyenne quatre-vingts candidats sont retenus sur dix-huit mille demandes et, à cette période précise, les embauches sont suspendues. Bassem prépare assidûment son entretien ; je savais qu’ils avaient besoin de mes qualifications spécifiques, le fait que je parle arabe était un atout supplémentaire. J’ai été embauché pour enseigner les programmes économiques du FMI aux économistes et aux fonctionnaires en Asie, en Afrique et dans le monde arabe tout en continuant mon activité de recherche et mes publications. Après cinq années passées à Washington, Bassem éprouve l’envie de rentrer à Monaco et entame une nouvelle carrière de consultant pour… le FMI qui l’embauche en tant que tel aussitôt. Il alterne les déplacements professionnels depuis Monaco. C’est l’époque du printemps arabe. Il est sollicité par les gouvernements et les banques centrales locales pour la mise en place de réformes économiques. Lors d’une de ses conférences, il rend hommage au professeur Chedli Ayari et recommande de suivre ses positions économiques. Ce dernier sera nommé très peu de temps après, gouverneur de la banque centrale de Tunisie. Durant cette période, j’ai pu faire des choses concrètes, dire ce que j’avais envie de dire, c’était très enrichissant. Lorsqu’un de ses anciens collègues du FMI lui propose de rejoindre la branche du FMI au Koweït pour former les employés des banques centrales et des ministères dans l’ensemble du monde arabe, il accepte…

Bassem Kamar avec Søren Johansen, Copenhague, 2004

Visions

En 2018, une nouvelle opportunité se présente. Il est recruté par la BERD afin d’ouvrir au Caire le bureau économique pour le Moyen-Orient. L’occasion de retourner dans son pays et de participer, comme il l’a toujours souhaité, à des projets d’envergure. Pendant trois années il met en pratique un plan stratégique de développement économique avec un budget de sept milliards d’euros. Sa priorité absolue : l’inclusion. J’ai toujours mis l’accent sur l’inclusion, il est primordial que les personnes deviennent actrices de leur propre développement. L’inclusion se crée en développant l’enseignement pour donner une chance égale à chacun, en délocalisant les projets pour couvrir tous les territoires, en tenant compte des répercussions environnementales. Ainsi, à la BERD, nous avons instauré un système de points en fonction de l’impact écologique du projet, qui pèse sur son financement. Ma priorité est aussi l’inclusion des femmes. Dans chaque projet, leur participation est non négociable. Il dirige les opérations, fédère un comité de gestion qui réunit de nombreuses institutions internationales. Le manque de vision à long terme des dirigeants de certains pays est un frein à leur développement et un de ses combats. Quand on établit un plan stratégique, on doit avoir une vision pour les cinquante années à venir. Cette opportunité, il la découvre en intégrant la banque centrale des Émirats arabes unis en tant que chef économiste chargé des prévisions économiques pour le pays. Les Émirats ont une vision claire de l’avenir, très détaillée, un plan jusqu’en 2071. Prenons l’intelligence artificielle – IA – par exemple. Aux Émirats, ils ont compris qu’en maîtrisant le sujet ils vont faire partie de ceux qui vont faire bouger les choses. Ils ont créé le premier ministère et la première université de l’IA au monde, la MBZUAI – Mohamed bin Zayed University of Artificial Intelligence. Cette année, ils ont signé un contrat de plusieurs milliards de dollars avec Microsoft pour mettre en place l’IA dans tous les domaines et l’enseigner. Aider les gouvernements, les institutions, les entreprises à développer une vision à long terme, c’est le cœur même de l’activité de GEFIC.

Valeurs

Bassem a l’âme d’un conteur. Le logo de GEFIC raconte une histoire. C’est un globe posi-tionné entre l’Afrique, l’Europe et le Moyen-Orient sur lequel repose une boussole. Nous guidons nos clients dans une direction individualisée et particulière. Les deux ailes représentent la navigation, dans un parfait équilibre. Avoir de la hauteur permet de réfléchir avec une vision plus large. La flèche verticale indique que nous cherchons à élever nos clients. Le listel doté d’une bordure dentelée fait référence à une pièce de monnaie, la spécialité de Bassem. Numismate, il a publié un livre chez l’Harmattan, qui retrace l’histoire de la monnaie et des taux de change depuis l’époque des pharaons. Je réfléchis à un prochain livre sur l’avenir de la monnaie, les crypto-monnaies, les monnaies numériques... La banque centrale des Émirats arabes unis est une des rares à avoir émis une monnaie digitale, c’est passionnant. La monnaie doit participer à l’inclusion financière partout dans le monde. L’inclusion, indissociable de la paix, sujet de préoccupation majeur pour Bassem qui envisage d’écrire un autre livre sur cette thématique. Il faut réfléchir à ce qu’il faudrait mettre en place pour vivre en paix. À tous les niveaux, individuel, collectif. Être en paix avec soi-même, avec les autres ; en paix avec la nature, l’environnement ; mettre fin aux conflits… S’il ne croit pas à la paix pour demain, il rêve d’un éveil collectif pour analyser ce qui ne fonctionne pas et que nous pourrions changer. Parmi la liste infinie de ses réflexions, l’utilisation de l’IA capable de synthétiser 3 000 ans de littérature pour nous aider à la compréhension du monde…

Intuitions

Bassem est un homme étonnant, il dégage lui-même une forme de paix intérieure. Il n’a jamais eu de plan de carrière, ses intuitions l’ont toujours guidé. La première fois qu’il croise celle qui deviendra son épouse, alors qu’ils sont étudiants : j’ai su immédiatement qu’elle allait devenir ma femme. Une énorme part de l’homme que je suis devenu, même si elle ne le reconnaît pas, c’est à elle que je le dois. Avec leurs enfants, elle le suit dans ses délocalisations, trouve toujours un nouvel emploi – elle enseigne actuellement l’économie diplomatique à l’académie diplomatique des Émirats. Tout au long de son parcours, Bassem a privilégié son sixième sens et tout naturellement… à chaque poste quitté a succédé une nouvelle opportunité. À peine a-t-il démissionné de la banque centrale que les demandes affluent. Parmi lesquelles un rôle de chef d’orchestre entre les diverses institutions qu’il connaît bien pour un gouvernement local, l’aide à l’implantation d’une industrie pharmaceutique dans un pays du Moyen-Orient, la réflexion stratégique pour le développement d’une start-up de la tech française dans les pays du Golfe… Les projets ambitieux ne manquent pas. Nomade des temps modernes, basé entre Abu Dhabi, Le Caire, Monaco et Paris, Bassem emprunte une nouvelle route, pilote son propre bolide, rodé aux mécaniques de l’équilibre et du mouvement… Il poursuit son chemin en harmonie avec ses convictions, nul doute, cet homme-là n’a pas fini de faire des étincelles. Bassem vient d'ailleurs d’être nommé conseiller économique du nouveau parti politique égyptien : la Prise de conscience. Un pas de plus dans l’intention d’agir avec ardeur pour un monde meilleur...

Bassem Kamar, photo Dominique Agius

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